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Page:Anatole France - La Rôtisserie de la reine Pédauque.djvu/251

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mon bon maître en soupirant, il faut que ce juif soit Isaac Laquedem en personne, pour blasphémer ainsi dans toutes les langues. Il m’a voué à une mort prochaine et violente avec une grande abondance d’images et il m’a appelé cochon dans quatorze idiomes distincts, si j’ai bien compté. Je le croirais l’Antéchrist, s’il ne lui manquait plusieurs des signes auxquels cet ennemi de Dieu se doit reconnaître. Dans tous les cas, c’est un vilain juif, et jamais la roue ne s’appliqua en signe d’infamie sur l’habit d’un si enragé mécréant. Pour sa part, il mérite non point seulement la roue qu’on attachait jadis à la casaque des juifs, mais celle où l’on attache les scélérats.

Et mon bon maître, fort irrité à son tour, montrait le poing à Mosaïde disparu et l’accusait de crucifier les enfants et de dévorer la chair des nouveau-nés.

M. d’Astarac s’approcha de lui et lui toucha la poitrine avec le rubis qu’il portait au doigt.

— Il est utile, dit ce grand cabbaliste, de connaître les propriétés des pierres. Le rubis apaise les ressentiments et vous verrez bientôt M. l’abbé Coignard rentrer dans sa douceur naturelle.