Aller au contenu

Page:Anatole France - M. Bergeret à Paris.djvu/114

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

lement assise sur les vertes pentes d’un fleuve paresseux. Pour écarter la lumière, il y avait là, dans les fonctions publiques et dans les magistratures, tout ce monde de politiciens et de cléricaux que M. Méline abritait naguère encore sous les pans de sa redingote villageoise, et qui y prospéraient dans l’ignorance consentie de la vérité. Cette élite, mettant l’iniquité dans les intérêts de la patrie et de la religion, la rendait respectable à tous, même au pharmacien radical-socialiste, Mandar.

Le département était d’autant mieux gardé contre toute divulgation des faits les plus avérés qu’il était administré par un préfet israélite. M. Worms-Clavelin se croyait tenu, par cela seul qu’il était juif, à servir les intérêts des antisémites de son administration avec plus de zèle que n’en eût déployé à sa place un préfet catholique. D’une main prompte et sûre il étouffa dans le département le parti naissant de la revision.