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Page:Anatole France - M. Bergeret à Paris.djvu/164

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poings sonores. Et comme il était très long, très mince, faible et de peu de poids, il sautillait sous les coups d’une façon tout à fait ridicule, et il montrait une tendance comique à s’échapper en hauteur. Sa tête nue était lamentable. Il avait cet air de submergé que prennent les myopes quand ils ont perdu leur lorgnon. Son visage exprimait la détresse infinie d’un être qui n’a plus de contact avec le monde extérieur que par des poignes solides et des semelles ferrées.

» Sur le passage de ce prisonnier malheureux, le citoyen Bissolo, bien qu’en territoire ennemi, ne put s’empêcher de soupirer et de dire :

» — C’est tout de même drôle que des républicains soient traités de cette manière-là dans une république.

» Je répondis poliment qu’en effet c’était assez joyeux.

» — Non, citoyen monarchiste, reprit Bissolo, non, ce n’est pas joyeux. C’est triste.