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Page:Anatole France - Pierre Nozière.djvu/189

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salade, le roi mit trois bouquets de cresson sur l’écu de sa bonne ville.

Je ne vous surprendrai point si je vous dis que les savants d’aujourd’hui ne donnent aucune créance à cette tradition.

Ils ont vu des sceaux du XIIIe siècle, et ils savent qu’alors les armes de la ville et châtellenie n’étaient pas les armes qu’on voit maintenant. Celles-ci datent du XIVe siècle. Lors de la guerre de Cent Ans, la petite ville eut beaucoup à souffrir et fit vaillamment son devoir. Il advint qu’un jour, elle fut près de tomber par surprise aux mains des Anglais. Mais un homme de la contrée s’introduisit dans la place, déguisé en paysan, et portant sur son dos une charge de légumes. Il avertit les défenseurs, qui se tinrent sur leurs gardes et repoussèrent l’ennemi. Les érudits du pays croient que c’est de ce jour que trois bottes de cresson prirent place sur l’écu de la ville. J’y consens, pour leur faire plaisir, et parce que l’historiette est honorable. Mais elle est aussi fort incertaine. Au reste, l’emblème du cresson convient à la modeste ville, qui ne s’enorgueillit que de ses jardins et de ses fontaines. Son écu est accompagné d’une devise latine qui fait entendre, par