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Page:Anatole France - Pierre Nozière.djvu/194

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le signe de la croix et l’eau bénite. Il est bien probable que de petits faunes ignorants et rustiques, ne sachant rien de la bonne nouvelle, épièrent entre les branches Onoflette et Longis, et, les prenant pour un chevrier et pour une bergère, jouèrent innocemment du pipeau sur leur passage.

Il fallut beaucoup d’exorcismes pour chasser ces menues divinités. Il subsiste encore aujourd’hui, aux environs de Vernon, quelques vestiges des cérémonies païennes. La veille du dimanche des brandons, les habitants des campagnes se rendent le soir dans les champs et se promènent sous les arbres avec des falots en chantant quelque vieille invocation. Fidèles sans le savoir à Cérès, leur mère, ces bonnes gens reproduisent ainsi d’antiques mystères et figurent d’une manière encore reconnaissable la déesse qui cherchait sa fille Proserpine à la lueur des feux de l’Etna. Je rapporte le fait sur la foi de M. Adolphe Meyer, le savant historien de la ville de Vernon.

Les plus magnifiques monuments ne sont pas toujours ceux qui parlent le plus à l’esprit ; parfois les yeux et la pensée ont peine à se détacher d’une humble pierre taillée par un ciseau