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Page:Anatole France - Pierre Nozière.djvu/308

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tombes revêtent la même forme dans la Grèce héroïque et chez les Celtes[1].

Que dis-je ? j’ai vu à Carnac le tombeau d’Elpénor. Seulement la rame y manquait, et les archéologues, en le fouillant, ont enlevé les armes et les os qui dormaient : c’est le tertre Saint-Michel, qui s’élève sur le rivage, « au bord de la blanche mer ».

Mais l’hôtesse vient m’annoncer que le souper est servi. L’omelette dorée brille sur la table, et l’odeur du mouton parfumé de thym emplit la chambre. Je laisse là mon Homère et mes rêveries. N’allez pas croire au moins que les Celtes étaient des Pélasges et qu’on parlait grec à Quimper comme à Mycènes.

  1. Dans son livre si méthodique et si profond sur « la religion des gaulois », M. Alexandre Bertrand a solidement établi, ce semble, que les peuples à dolmens n’étaient point des celtes. Mais il ne saurait être question ici d’ethnographie. On s’y contente d’une vue très générale du culte des morts sur la terre de Bretagne, où plusieurs races humaines se sont superposées. Et c’est encore M. Alexandre Bertrand qui fait à ce sujet une remarque judicieuse : « Les religions recueillent, dans le cours de leur développement, des éléments nouveaux qui les rajeunissent et les transforment, mais sans qu’elles se débarrassent jamais complètement de leur passé…

    « Ces observations trouvent particulièrement leur application dans les pays dont la population, comme en Gaule, se compose de plusieurs couches successives et diverses de conquérants et d’immigrants, de complexion religieuse différente, ayant eu chacun leurs divinités particulières qu’ils ont dû tenter d’introduire dans le culte national, ou à ce défaut, qu’ils ont dû conserver à titre de culte familial ou de tribu. » (Loc.cit., p. 215).