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Page:Anatole France - Rabelais, Calmann-Lévy, 1928.djvu/32

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à peu près semblable. Budé le félicite surtout d’avoir récupéré ses livres et d’être désormais à l’abri de toute violence.

« J’ai reçu d’un des plus éclairés et des plus humains d’entre vos frères et je lui ai fait affirmer sous serment la nouvelle qu’on vous avait restitué ces livres, vos délices, confisqués sur vous arbitrairement, et que vous étiez rendus à votre liberté et à votre tranquillité premières. »

Guillaume Budé ne se trompait pas. Les deux cordeliers étaient hors de danger. Les affaires de Rabelais allaient au mieux : Frère François recevait du pape Clément VII un indult qui l’autorisait à passer dans l’ordre de saint Benoît et à entrer dans l’abbaye de Maillezais avec le titre et l’habit de chanoine régulier et la faculté de posséder des bénéfices. Ces licences ne suffirent pas encore à Rabelais qui, sans les farfadets, eût été, peut-être, un excellent moine : mais il ne pouvait souffrir le son des cloches et n’aimait pas à interrompre ses études pour aller à matines. Il se mit à courir le monde, disant la messe à l’occasion.

Cette irrégularité n’était pas pour choquer excessivement l’évêque de Maillezais qui savait quel homme exquis était Frère François, puisqu’il l’avait eu pour condisciple à la Baumette.

Geoffroy d’Estissac était un jeune prélat, monté en 1518, à moins de vingt-cinq ans, avec dispense, sur le siège de Maillezais, où il menait une vie élégante et seigneuriale. Maillezais, assise