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Page:Anatole France - Thaïs.djvu/293

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plus qu’un songe. Thaïs va mourir ! Oh : comme naturellement je mourrai de sa mort ! Mais peux-tu seulement mourir, embryon desséché, foetus macéré dans le fiel et les pleurs arides ? Avorton misérable, penses-tu goûter la mort, toi qui n’as pas connu la vie ? Pourvu que Dieu existe et qu’il me damne ! Je l’espère, je le veux. Dieu que je hais, entends-moi. Plonge-moi dans la damnation. Pour t’y obliger je te crache à la face. Il faut bien que je trouve un enfer éternel, afin d’y exhaler l’éternité de rage qui est en moi.

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Dès l’aube, Albine reçut l’abbé d’Antinoé au seuil des Cellules.

— Tu es le bien venu dans nos tabernacles de paix, vénérable père, car sans doute tu viens bénir la sainte que tu nous avais donnée. Tu sais que Dieu, dans sa clémence, l’appelle à lui ; et comment ne saurais-tu pas une nouvelle que les anges ont portée de désert en désert ? Il est vrai. Thaïs touche à sa fin bienheureuse. Ses travaux sont accomplis, et je dois t’ins-