Page:Anatole Leroy-Beaulieu - Empire des Tsars, tome 1, Hachette, 1890.djvu/242

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

les plus maritimes. Déjà la Germanie lui avait opposé une masse trop épaisse et un climat trop rigoureux pour elle ; la Russie en fut à peine effleurée dans ses plages méridionales. Les Grecs avaient eu de précoces relations avec les indigènes. Ils nous ont eux-mêmes conservé le souvenir du Scythe, c’est-à-dire du Russe Anacharsis, et les bijoux, découverts dans les tombeaux des steppes, ont montré que ces lointaines solitudes n’avaient pas été fermées à l’art hellénique. Comme tous les grands États de l’Europe, la Russie a eu quelques portions de son territoire sous la domination grecque ou romaine. Ce n’est toutefois qu’au moyen âge, grâce à Constantinople, que les Russes subirent de loin l’influence de la Grèce et de Rome : elle leur parvint alors, mais par un canal détourné et corrompu. Byzance, à l’époque de sa décadence, fut la seule Rome qu’ils connurent, le Bas-Empire le seul modèle que leur offrit la civilisation grecque et latine.

Tout autre est le rôle et l’importance de l’élément barbare. Comme les États de l’Occident, l’État russe semble avoir été fondé par des Germains chez un peuple bientôt conquis au christianisme. C’est là une première, une évidente analogie avec ces histoires européennes qui, à l’origine, ont toutes l’air de se répéter. Sous la ressemblance se montre cependant déjà la diversité. La Russie nous offre un fonds national différent, bien que de race voisine, le fonds slave au lieu du fonds celte ou germain. Quel est l’apport primitif de ces Slaves à la civilisation ? Le Russe voudrait asseoir sur eux sa culture comme sa nationalité. L’histoire malheureusement ne les connaît guère au temps de leur vie isolée. Aucun Tacite ne nous a laissé une Slavie analogue à la Germanie du gendre d’Agricola. Dans l’ancienne Sarmalic, on trouve de bonne heure les Slaves en contact avec des allogènes germains ou finnois. Dès avant Rurik, les Slaves du Dniepr et du Volkof se livraient à l’agriculture ; déjà ils étaient sédentaires, habitant de solides maisons de bois ; déjà ils avaient des villes ou