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Page:Anatole Leroy-Beaulieu - Empire des Tsars, tome 1, Hachette, 1890.djvu/56

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l’Europe ou l’Asie, les autres lui offrant dans leurs montagnes de précieuses richesses minérales, la plupart lui gardant dans leurs forêts d’immenses réserves de bois, quelques-unes enfin lui servant au midi de jardins et comme de serres ou de vergers.

L’inégale répartition des habitants dans les diverses provinces fait que les moyennes statistiques ne donnent qu’une très fausse idée de la relation réelle de la population et de la surface du sol. Si l’empire, dans son entier, n’a que 5 habitants au kilomètre carré, si la Russie d’Europe elle-même n’en compte que 17 ou 18, les parties les plus productives, la région industrielle de Moscou, la région agricole de la Terre noire sont, pour la densité de la population, en train de se rapprocher de l’Europe centrale et l’emportent déjà sur l’Espagne. Au lieu d’être éparpillés et comme perdus sur d’immenses espaces, les deux tiers de la population russe sont concentrés sur une surface qui n’a guère plus de trois fois l’étendue de la France. Or, en Russie comme partout, l’agglomération de la population donne plus de facilités à la civilisation, plus de force et de cohésion au peuple, plus de moyens d’action au gouvernement.

D’une moitié de son territoire européen et des trois quarts de ses possessions asiatiques, en proie à l’extrême froid ou à l’extrême sécheresse, la Russie ne saurait espérer un notable accroissement du nombre de ses habitants. Bien que trois fois plus vaste que la Russie d’Europe, la Russie d’Asie semble hors d’état de nourrir une population égale. Avec quatre-vingts millions d’habitants, la Sibérie, le Turkestan et le Transcaucase réunis pourraient se trouver relativement aussi peuplés que la Russie cisouralienne avec cent millions[1]. À prendre les condi-

  1. Voyez dans la Revue des Deux Mondes notre article du 15 août 1873 et dans la Rousskaïa Mysl (janv. 1881) une étude de M. Vénioukof, publiée depuis la 1re édition de cet ouvrage.