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Page:Anatole Leroy-Beaulieu - Empire des Tsars, tome 3, Hachette, 1889.djvu/603

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ecclésiastiques n’incombent pas à la personne, mais à la terre. Pour s’en affranchir, il faut les racheter : les redevances en nature peuvent, en effet, être rachetées en argent, d’après un tarif établi par les propriétaires, d’accord avec leurs tenanciers. Ceux-ci, disent les premiers, ne sauraient se libérer par l’apostasie. Pour leur en enlever la tentation, certains propriétaires ont pris les dîmes à leur charge en relevant d’autant le loyer de leurs terres.

Un des soucis du gouvernement dans son œuvre de prosélytisme, c’est la construction d’églises et d’écoles orthodoxes. La Ritterschaft, qui possède presque tout le sol, se refusant à en laisser élever sur ses domaines, il a fallu recourir à l’expropriation. Pour une école ou une église orthodoxe, l’administration est autorisée à tout exproprier, saur les maisons d’habitation. Le plus zélé luthérien peut voir les popes s’installer au milieu de ses terres pour faire de la propagande parmi ses paysans. De même, la plupart des écoles rurales avaient été ouvertes par la noblesse et placées par elle sous l’autorité des pasteurs. Il y avait dans les trois provinces, sans comparaison les plus instruites de la Russie, plus de 2000 écoles luthériennes. Alexandre III les a en quelque sorte laïcisées pour les russifier, en les faisant passer au ministère de l’instruction publique. Aucun coup n’a été plus sensible au luthéranisme.

C’est là une mesure telle que s’en permettent d’autres États aux dépens d’autres clergés. Il n’en est pas de même de la législation appliquée aux mariages mixtes. L’empereur Nicolas avait édicté des lois ordonnant d’élever dans la foi grecque les enfants issus de mariages entre protestants et orthodoxes. Alexandre II avait rendu aux Livoniens la liberté d’élever leurs enfants à leur gré. C’était là, semblait-il, une mesure aussi politique qu’humaine, l’État ayant tout intérêt au rapprochement des diverses nationalités ; mais, en Russie, pareille liberté était un privilège. Alexandre III l’a supprimée ; il a ordonné, en 1885, d’appliquer, à tous, les règlements draconiens de Nicolas.