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Page:Anatole Leroy-Beaulieu - Empire des Tsars, tome 3, Hachette, 1889.djvu/664

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n’a pas exercé sur les compatriotes de Tolstoï et de Dostoievsky la même fascination que sur les Anglais, les Américains ou les Allemands. Si, à l’exemple de leurs deux grands romanciers[1], certains Russes semblent imbus d’une sorte de bouddhisme latent, c’est d’instinct et à leur insu. La foi du Bouddha, qui a gagné des adeptes en Angleterre et en Amérique, n’a pas fait de prosélytes en Russie. Je ne connais guère qu’une exception, une femme, Mme Blavatsky. Non contente de proclamer la supériorité du bouddhisme, cette Russe y a cherché « le syncrétisme » de l’Orient et de l’Occident, de la science moderne et de la théurgie antique. Après avoir épuisé les plaisirs de la vie mondaine, Mme Blavatsky a parcouru l’Inde ; elle s’y est abouchée avec les brahmanes et les fakirs et en a rapporté les principes d’une théosophie hermétique qui compte des initiés dans les deux mondes[2].



  1. Pour Tolstoï, voyez p. 546. Pour Dostoievsky, voyez, à la fin des Frères Karamazof, l’apparition du moine Zosime en rêve au jeune Alexis, là où le starets enseigne que les animaux, le bœuf, le cheval, étant sans péché, le Christ est avec eux, avant d’être avec l’homme.
  2. Mme Blavatsky a fait paraître, dans le Vestnik Evropy, sous le pseudonyme de Radda-Bay, des études sur les sciences occultes des Indous. Depuis, elle a été l’une des fondatrices et en quelque sorte la prophêtesse de la « Société Théosophique » qui a eu successivement pour organes : the Theosophist de Madras, l’Aurore du jour nouveau, le Lotus publié à Paris en 1888.