Page:Andry - L’Orthopédie, tome II.djvu/294

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Récitez-nous, dit-on à un enfant, la fable du Corbeau & du Renard : L’enfant la récite ; & quand il l’a finie, on lui demande celle de la Fourmi & de la Cigale ; il ne l’a pas plûtôt expédiée, qu’on exige encore de lui, celle de la Grenouille qui veut se rendre aussi grosse que le Bœuf ; puis, celle du Loup & de l’Agneau. On ne lui laisse point de repos, qu’il n’en ait ainsi débité de suite un grand nombre ; & chaque jour, on lui en fait tant dire & redire, que ses poumons n’y peuvent plus tenir. Vient-il compagnie dans le logis ? on appelle l’enfant, & il faut que cette compagnie aux dépens du pauvre enfant, soit régalée au moins ; (mais quel régal) de cinq ou six fables ; & encore ces fables, les lui fait-on prononcer avec un geste & un ton capables de détruire toutes les dispositions naturelles qu’il pourroit avoir à s’énoncer comme il convient. Il ne faut jamais contraindre les enfans à rien apprendre & à rien réciter par cœur. Racontez-leur vous-même les choses que vous trouvez à propos qu’ils sçachent ; mais les leur racontez comme par maniere d’acquit, & sans leur faire une obligation de vous écouter ; ou plûtôt racontez les en leur présence à quelque