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Page:Anglade - Les troubadours, 1908.djvu/241

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marquis de Malaspina, est un des plus anciens. Gênes a donné naissance à une véritable pléiade ; quelques-uns ont été retrouvés tout récemment ; Lanfranc Cigala et Boniface Calvó sont les meilleurs. Le premier fut juge dans sa ville natale. « Il chantait volontiers de Dieu », nous dit son biographe. Il semble avoir eu en effet une conception élevée de son art et ses sirventés politiques, comme ses chansons de croisade, ne manquent pas de vigueur. Il est un des premiers, comme on l’a vu dans le précédent chapitre, à appliquer aux chansons à la Vierge les formules de la lyrique courtoise.

Son compatriote et contemporain Boniface Calvó[1] paraît avoir été d’humeur plus vagabonde que le juge poète Lanfranc Cigala. Il passa une partie de sa vie auprès du prince le plus lettré du temps, Alphonse X, roi de Castille. C’est là qu’il composa la plupart de ses sirventés, dont quelques-uns renferment, contre son protecteur, des plaintes que l’on retrouve chez d’autres troubadours vivant en Espagne.

Ses chansons, comme l’a remarqué Diez[2], se distinguent par une certaine recherche de traits nouveaux. C’est ainsi que, pour mieux exalter la beauté de sa dame, il suppose que Dieu lui-même, s’il voulait aimer une mortelle, n’en choisirait pas d’autre. Une élégie touchante sur la mort de celle qu’il aimait se termine par un trait analogue. « Je ne demande pas à Dieu de la recevoir en son paradis… car à mon avis, sans elle, la beauté du paradis ne

  1. Boniface Calvó a été édité par M. Pelaez, Turin, 1897 (Extrait du Giornale Storico della letteratura italiana, XXVIII-XXIX).
  2. Diez, Leben und Werke, p. 392.