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Page:Annales de pomologie belge et étrangère - 5.djvu/12

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cite, il en est un dont la description semble se rapporter au Pineau. Pline constate comme lui l’existence de diverses variétés de vignes, particulières à chaque province de l’empire romain, suivant la nature du sol et la différence du climat.

Il est à remarquer que la vigne croissait à l’état sauvage dans plusieurs parties tempérées de l’Europe, et que si l’on considère la difficulté des transports et des relations dans les temps anciens, on peut supposer que les variétés dont il s’agit ici ont pris naissance en France : c’est l’hypothèse la plus probable, malgré l’opinion qui leur assigne une origine italienne.

L’établissement d’un grand nombre de monastères en Bourgogne date du ve siècle ; c’est alors et par les soins des religieux que la culture de la vigne y prit une grande extension. Dès le xiiie siècle, la haute renommée des vins de cette province, due non-seulement i la nature de son sol, mais à la valeur spéciale des cépages qui les produisent, amenèrent un tel développement dans cette culture, que tous les côteaux susceptibles de donner ces produits furent utilisés.

Les vins de la Côte-d’Or, quelles que soient leurs nuances de finesse, de durée et de bouquet, sont tous obtenus par la culture d’une seule variété de vigne, le Pineau, dont les modifications principales sont représentées dans le tableau ci-contre. Cette variété semble avoir été de tout temps la seule qui ait produit des vins à bouquet, et mérite le surnom de Plant noble, donné par les anciens vignerons.

Les trois variétés de ce plant, à grains noirs, roses ou blancs, présentent les mêmes caractères principaux, et ont toujours été considérées par les vignerons comme une même famille : elles paraissent être, en effet, le résultat de modifications ou d’accidents de culture arrivés au Pineau noir. Le gris ou Burot se produit si fréquemment sur le cep de la variété noire, qu’on doit arracher chaque année un certain nombre de pieds de Burots pour éviter une multiplication excessive. On a remarqué aussi, mais plus rarement, des branches portant des raisins blancs sur des pieds de Pineau noir.

En dehors de ces trois modifications principales, on en remarque un grand nombre de moindre importance ; elles sont considérées comme des dégénérescences, qui exigent de la part des vignerons un œil attentif et des soins continuels ; mais par suite de l’habitude ils sont parvenus à les reconnaître avec certitude, même en hiver, à la seule inspection du bois[1].

Les raisins Pineaux sont si impressionnables à toutes les conditions du sol dans lequel ils sont plantés, qu’il en résulte des nuances à l’infini dans la qualité des vins ; cette excessive délicatesse ne se borne pas à ressentir l’influence des sucs nourriciers absorbés par les racines ; un exemple des plus curieux, dont nous fûmes témoin en 1842, nous a fait connaître l’action énergique des agents extérieurs sur les fruits qui les produisent.

Au moment de la récolte, un orage éclata en Bourgogne, et atteignit une partie de la commune de Pomard ; l’un des meilleurs crus de ce finage, la côte des Arvellez, traversée par des courants d’eau chargés de terre, eut une grande partie des grappes couvertes de boue. Peu de jours après, aux vendanges, le propriétaire eut grand soin de faire laver toutes les grappes avant qu’elles fussent jetées dans les cuves ; malgré cette précaution, le vin des Arvellez avait un goût terreux aussi prononcé que si l’on y eût mélangé de l’argile.

Les caractères généraux des Pineaux sont les suivants :

Grappes petites, de formes variées et irrégulières, très-serrées, lorsque la coulure n’a pas éclairé les grains ; ceux-ci sont ronds, petits ou moyens ; la peau est assez épaisse ; les pepins sont petits, au nombre d’un ou deux dans chaque grain ; le jus est abondant, sucré, relevé, vineux ; les sarments sont grêles, allongés, bruns ou gris-bruns, d’une grosseur égale dans tout leur développement.

Les feuilles sont grandes, un peu rugueuses en dessus, lisses en dessous ; elles sont lobées,

  1. Nous devons ces renseignements à M. le docteur Lavalle, directeur du Jardin botanique de Dijon.