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Page:Anonyme - La goélette mystérieuse ou Les prouesses d'un policier de seize ans, 1886.djvu/32

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À deux cents pas environ du bord de l’eau, M. Halt se heurta contre un gros homme qui lui parut avoir une vague ressemblance avec l’homme à la pipe. Mais l’individu en question était occupé à lire une affiche et ne retourna même pas la tête.

— Allons, se dit M. Halt, encore une fausse alarme ! J’ai vraiment l’esprit troublé ; et je vois partout des gens qui me guettent. Comme si quelqu’un avait assez de temps à perdre pour suivre mes pas ! ajouta-t-il en riant.

Était-ce une fausse alarme ? Tel ne parut pas être l’avis de notre ami Joe ; car, d’aussi loin qu’il aperçut le lecteur d’affiches il s’arrêta court. Fort heureusement, un omnibus parut en ce moment dans la rue. Joe en profita fort habilement pour se dissimuler derrière lui et allongea le pas, de façon à marcher aussi vite que les chevaux et à mettre l’épaisseur de l’omnibus entre sa personne et les yeux de l’individu qui avait excité un instant auparavant les soupçons de M. Halt.

— Bah ! fit-il en riant, avec mon nouveau costume, c’est bien le diable si mon oncle aura eu l’idée de me reconnaître. Il est trop occupé de son gibier pour regarder d’un autre côté. Mais c’est égal. Je tiens à ne pas le rencontrer ici, au moins pour le moment.

M. Halt était à peu près à l’extrémité de la rue Des Forges, lorsqu’il vit déboucher, sur le même trottoir que lui, un homme marchant en sens inverse et à la boutonnière duquel il remarqua de suite une branche de réséda.

C’était un homme court, bien bâti, avec une physionomie un peu rude, des traits accentués, des yeux gris et perçants. Au moment où il s’approchait, M. Halt remarqua avec stupeur une particularité bien faite pour réveiller toute sa défiance. L’étranger était pourvu d’une épaisse chevelure, d’une couleur si absolument rouge que des carottes eussent pu en être jalouses.