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Page:Anonyme - Macaire, chanson de geste.djvu/132

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cxxiv
Préface.

grâce aux précautions que j’ai dû, que j’ai pu prendre contre cette mauvaise chance.

On n’est pas aussi dénué de ressources qu’on le pourrait croire dans une entreprise comme celle où je me suis engagé, puisque les éléments de comparaison abondent entre les textes en français italianisé et les textes en français pur. Par là on peut se faire une idée assez exacte des procédés, pour ainsi parler, selon lesquels les Italiens ont défiguré une partie de nos anciens poëmes. J’ajoute qu’à restituer un texte en vers, il y a moins d’incertitude, moins de péril qu’à faire le même essai sur un texte en prose, et cela à cause du mètre, qui d’un côté marque mieux les fautes, et de l’autre ne permet pas d’aller trop loin chercher les corrections, en resserrant dans de certaines limites le choix des mots ou des tours à mettre en œuvre. Enfin, on m’accordera bien aussi qu’un commerce assidu et prolongé avec nos anciens trouvères est encore un moyen de ne pas tomber dans des suppositions trop choquantes.

Est-ce à dire que je me flatte d’avoir partout remplacé le terme ou le tour du compilateur de Venise par l’expression même qu’il avait sous les yeux? Assurément non. Pareille divination serait presque impossible, mais aussi presque inutile. Je m’explique.

Si, par malheur (horresco referens !) l’Énéide n’était parvenue jusqu’à nous que sous une forme barbare, analogue à celle qu’a reçue en Italie la chanson de la Reine Sibile, nous n’aurions plus que le tableau d’un grand maître gratté et repeint par un barbouilleur. Les traits qu’il aurait