Aller au contenu

Page:Anonyme ou Collectif - Voyages imaginaires, songes, visions et romans cabalistiques, tome 1.djvu/302

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
296
Les aventures

serrer plusieurs choses, & à en aller chercher d’autres. Si, par exemple, je tuois une chèvre, je la pendois à un arbre, je l’écorchois, l’accommodois, & la découpois, & l’apportois ainsi au logis. J’en faisois de même à l’égard de la tortue ; je l’éventrois, en prenois les œufs & quelques morceaux de sa chair que j’apportois au logis dans ma corbeille, laissant tout l’inutile. De profondes corbeilles me servoient de greniers pour mon bled, que j’acommodois dès qu’il étoit sec.

Ma poudre commençoit à diminuer : si elle m’avoit manqué, j’étois tout-à-fait hors de pouvoir d’y suppléer de nouveau. Cette pensée me fit craindre pour l’avenir. Qu’aurois-je fait sans poudre ? Comment aurois-je pu tuer des chèvres ? Je nourrissois à la vérité une chevrette depuis huit ans : je l’avois apprivoisée dans l’espérance que j’attraperois peut-être quelque bouc ; mais je ne pus le faire que lorsque ma chevrette fut devenue une vieille chèvre. Je n’eus jamais le courage de la tuer ; je la laissai mourir de vieillesse.

Mais étant dans l’onzième année de ma résidence, & mes provisions étant fort racourcies, je commençois à songer aux moyens d’avoir des chèvres par adresse. Je souhaitois fort d’en attraper qui fussent en vie ; & s’il étoit possible, d’avoir des chevrettes qui portassent.

Pour cet effet je tendis des filets, & je suis