Aller au contenu

Page:Anonyme ou Collectif - Voyages imaginaires, songes, visions et romans cabalistiques, tome 1.djvu/71

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
66
Les aventures

pereur de Maroc, ou de quelqu’un des rois ses voisins ; car nous n’y vîmes ame du monde.

Cependant je redoutois fort les maures, & j’avois si grande peur de tomber entre leurs mains, que je ne voulus ni m’arrêter, ni prendre terre, ni mouiller l’ancre ; mais je continuai ma course pendant cinq jours entiers que dura ce vent favorable, au bout duquel tems le vent changea, & devint sud. Alors je conclus, que si j’avois à mes trousses aucun bâtiment de Salé, il cesseroit de me donner la chasse. Ainsi je me hasardai à approcher de la côte : je jetai l’ancre à l’embouchure d’une petite rivière, dont j’ignorois le nom, la latitude, le pays par où elle passoit, les peuples qui en habitoient les bords : je ne vis, ni ne me souciois de voir aucune personne ; ce dont j’avois plus de besoin, étoit de l’eau fraîche. Ce fut sur le soir que nous entrâmes dans cette petite baie : je résolus, dès aussi-tôt qu’il feroit nuit, d’aller à la nâge, & de reconnoître le pays. Mais la nuit étant venue, nous entendîmes un bruit si épouvantable, causé par les hurlemens & les rugissemens de certaines bêtes sauvages, dont nous ne savions pas l’espèce, que le pauvre petit garçon faillit à en mourir de peur, & me supplia instamment de ne vouloir point débarquer jusqu’à ce qu’il fût jour. Je me rendis à sa prière, & je