Aller au contenu

Page:Apollinaire - Le Poète assassiné, 1916.djvu/179

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
65
LE POÈTE ASSASSINÉ

et coucherai avec elle, mais avant tout je veux aller chez les Théâtres pour y porter ma pièce Iéximal Jélimite que j’ai écrite dans ton atelier l’an dernier en mangeant des citrons.

— Fais ce que tu veux, mon ami, dit l’oiseau du Bénin, mais n’oublie pas Tristouse Ballerinette, ta femme à venir.

— Bien parlé, dit Croniamantal, mais je veux rugir une fois encore le sujet d’Iéximal Jélimite. Écoute :

Un homme achète un journal au bord de la mer. D’une maison située côté jardin sort un soldat dont les mains sont des ampoules électriques. D’un arbre descend un géant ayant trois mètres de haut. Il secoue la marchande de journaux qui est de plâtre et qui en tombant se brise. À ce moment survient un juge. À coups de rasoir il tue tout le monde, tandis qu’une jambe qui passe en sautillant assomme le juge d’un coup de pied sous le nez, et chante une jolie chansonnette.

— Quelle merveille ! dit l’oiseau du Bénin, je brosserai les décors, tu me l’as promis.

— Cela va sans dire, répondit Croniamantal.