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Page:Arène - Œuvres, 1884.djvu/197

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le doigt de la Providence !) sous le même figuier où j’étais né.

Je fis un rêve tout éveillé, en descendant vers la rue des Couffes.

Je me voyais à la place de mon père, dans le bastidon de la Cigalière, l’œil collé au trou du volet. Le jour levant blanchissait à peine ; les vignes, les champs étaient déserts ; les cultures, laissées de la veille, attendaient.

Puis, un bruit de grelots. Une voiture qu’il me semblait connaître, s’arrêtait au bas du champ, sur le chemin. Un grand diable brun et sec en descendait, Janan sans doute ;… il choisissait l’endroit… il creusait une fosse… Qu’apportent ces trois vieilles femmes, dans un drap ?…

Les branches et le tronc m’empêchaient de bien voir, comme mon père, mais je croyais distinguer, dépassant le drap, des cheveux noirs flottants et une petite main.

C’était fini, j’entendais la terre tomber. Les vieilles remportaient le drap et la pioche… Un coup de fouet !… En route, en route, disait Janan, et, au même moment, le soleil apparu colorait en rose la vieille vigne, le tronc lisse et les larges feuilles du figuier, la voiture qui disparaissait au tournant du chemin, et la terre fraîche de la fosse !

Une question me restait à faire ;

— « À propos, père, quel jour donc ces bohémiens s’amusèrent-ils à fouiller ainsi sous le figuier ?