Page:Arago - Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences, tome 3.djvu/12

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lait franchir deux murs élevés, il résolut d’expulser les domestiques. Gay-Lussac l’apprend, sollicite une audience, l’obtient, et là il s’écrie : « les domestiques sont innocents ; ce sont les élèves qui ont pris vos fruits ; je ne vous dirai pas qui faisait partie de l’expédition, mais je suis sûr du fait, car j’en étais ! » Ajoutons que la franchise exceptionnelle du jeune Gay-Lussac n’eut pour lui en cette circonstance, aucune conséquence fâcheuse. Elle lui valut, au contraire, l’affection toute particulière du directeur de la pension et de sa femme, qui, à partir de cette époque, lui prodiguèrent des soins vraiment paternels.

Gay-Lussac commença à s’occuper de la langue latine sous la direction d’un ecclésiastique qui résidait à Saint-Léonard, et pour lequel il a toujours montré le plus sincère attachement. Afin de concilier son goût pour les plaisirs bruyants de la jeunesse avec le désir qu’il avait d’accomplir ses devoirs, après avoir joué toute la journée avec ses camarades, il consacrait à l’étude une partie de ses nuits.

La Révolution de 89, si légitime dans son but, et qui commença avec tant de grandeur et de majesté, avait fini par se jeter dans de déplorables écarts. La loi des suspects atteignit le père de Gay-Lussac ; la translation de cet excellent homme à Paris eût peut-être causé sa mort.

Notre ami, fort inquiet, se rendait assidûment au club qui se réunissait dans sa ville natale, pour y saisir les moindres indices qui pouvaient menacer son père adoré.

La vue d’un jeune homme fort et vigoureux inspira aux meneurs de l’époque le projet de l’enrôler dans l’armée qui alors combattait les Vendéens ; Gay-Lussac eût volon-