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Page:Arago - Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences, tome 3.djvu/580

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faire qu’en arrivant dans la salle de nos séances. « Voilà, s’écria-t-il aussitôt, un bien cruel événement : il nous rapetisse tous ! »

Cette exclamation résume d’une manière fidèle et naïve les sentiments douloureux que chacun de nous éprouvait ; elle caractérise mieux que de longs discours le malheur que nous déplorons aujourd’hui. La Société royale de Londres, l’ancienne Académie des sciences de Paris, celles de Pétersbourg et de Stockholm furent frappées au cœur quand elles perdirent Newton, d’Alembert, Euler, Linné. Notre tour est venu, Messieurs : la classe de l’Institut, au nom de laquelle j’ai l’honneur de parler, a été frappée au cœur le 13 mai 1832.

Depuis quelques années, la mort, comme la foudre, s’attaque aux sommités : c’est ainsi, Messieurs, mon énumération sera malheureusement bien longue, c’est ainsi que Montgolfier, Fourcroy, Malus, Lagrange, Monge, Haüy, Delambre, Berthollet, Carnot, Lamark, Laplace, Fresnel, Fourier, Vauquelin, ont été coup sur coup enlevés aux sciences dont ils étendaient sans cesse le domaine, à la France qui s’honorait de leur renommée, à l’Académie qu’ils couvraient de leur gloire. Dans tout autre pays la disparition de cette double et brillante pléiade eût été irréparable ; en France, terre féconde et privilégiée, d’illustres géomètres, de grands chimistes, d’ingénieux physiciens, de savants naturalistes ont promptement placé leur nom à côté des noms européens que je viens de rappeler. Aujourd’hui même, je l’affirme avec la certitude de n’être démenti nulle part, la seule ville de

Paris compte encore dans son sein un plus grand nombre