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Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 3.djvu/354

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qui l’entretenait de la situation de son armée. Ces troupes paraissaient croire que celles du Nord, qui n’allaient pas contre l’ennemi, étaient mieux entretenues, mieux payées que celles de l’Artibonite, toujours guerroyant : de là leur insubordination

« Je suis profondément touché du tableau que vous me faites de la situation de votre armée, et de la faiblesse des ressources de l’administration des Gonaïves pour l’améliorer. Je sens, comme vous, la nécessité de venir au secours des braves gens qui la composent, et la commission fera à cet égard tout ce qui sera possible. Quelques brillantes couleurs qu’on ait données à la situation du Nord, elle est bien loin d’être aussi aisée qu’on a pu vous le dire. Nous avons, il est vrai, une belle perspective, des espérances flatteuses ; mais nous ne vivons encore que d’espoir, et la réalité de nos moyens est très-bornée… Je désirerais qu’il vous fût possible d’avoir moins de troupes réglées ; car une armée nombreuse qu’on ne paye pas ou qu’on paye mal, est un feu dévorant pour l’endroit où elle passe. En Amérique comme en Europe, tout grand rassemblement est essentiellement dévastateur… »

Et alors, Sonthonax propose à T. Louverture de licencier le 2e régiment du Cap, qui, dans l’Artibonite, a donné l’exemple de la désertion et de l’insubordination aux autres corps, chaque soldat cherchant à gagner ses foyers.

« Je vous propose aussi d’envoyer au Cap un bataillon pour y être quelque temps en garnison et être successivement relevé par un autre. Les officiers et soldats de ces régimens verraient par eux-mêmes, que si leurs frères d’armes jouissent ici de quelques douceurs dont on leur a fait un si brillant tableau, ils ne les doivent qu’aux occasions de trouver dans une ville populeuse et commerçante, des