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Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 4.djvu/416

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ment de l’esclavage, et qui s’inquiétait sans cesse du sort des siens après sa mort…[1].

T. Louverture n’avait pas effectivement besoin de rêver à une chose qui existait de fait par son odieux système ; et s’il s’inquiéta jamais du sort de ses frères, après sa mort, il leur fit un sort pénible de son vivant.

Au moment où l’ordre chronologique va nous amener à parler du sanglant épisode qui entraîna la mort de cet infortuné Moïse, nous avons tenu à citer ces passages du livre de notre compatriote, immédiatement après ceux que nous avons empruntés aux Mémoires de Pamphile de Lacroix, qui résument si bien tout le système de T. Louverture.

On voit, d’après M. Madiou (et il a raison), que Dessalines lui-même ne s’aveuglait pas sur cette situation tendue, malgré la férocité qu’il mettait dans l’exécution des mesures ordonnées par son chef. Il arriva donc à penser comme Moïse ! Mais, plus prudent que ce dernier et passivement obéissant, ayant d’ailleurs l’instinct de la violence, il n’osait pas s’exprimer aussi publiquement que lui : les liens du sang ne l’unissaient pas, comme son collègue, au gouverneur qui ne savait souffrir aucune contradiction. C’est beaucoup cependant, en faveur de Moïse, que cette conformité dans le jugement de ces deux principaux généraux.

Ensuite, est-il vrai que la terreur s’était évanouie, en présence de ce pouvoir absolu qui se faisait sentir partout ? Où la terreur peut-elle exister, si ce n’est quand l’arbitraire s’exerce dans la plénitude de la puissance ? Les blancs colons dominaient, soutenus par l’autorité du gouverneur ;

  1. Histoire d’Haïti, t. 2, p. 116, 117 et 118.