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Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 4.djvu/477

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le gouvernement consulaire ne pouvait saisir un moment plus favorable pour agir contre T. Louverture, que celui où il dirigeait la flotte française dans cette colonie. Ce gouverneur de motu proprio venait de mettre le comble à sa tyrannie, par le supplice de Moïse et les meurtres commis dans le Nord sur les noirs cultivateurs. Les officiers supérieurs redoutaient tous le sort de leur collègue, de leur frère d’armes ; toutes les parties de la population soupiraient après un changement dans l’état des choses, et ce changement ne pouvait venir que de la métropole : toutes les espérances étaient donc dirigées vers la France, mais vers la France libérale et non réactionnaire. La résistance qui fut opposée à l’armée expéditionnaire, n’a été occasionnée d’abord que par les craintes conçues à son apparition, et ensuite par ces espérances déçues, et non par le dévouement qu’on portait à T. Louverture.

Aussi, le colonel Vincent, qui connaissait l’esprit de la population noire, avait-il fait tout ce qui dépendait de lui pour détourner le Premier Consul de la résolution d’envoyer cette armée, en exposant d’ailleurs toutes les difficultés de l’entreprise par rapport à l’influence du climat sur les troupes européennes, — « sans prétendre néanmoins qu’elle fût impossible[1] » On profita des renseignemens qu’il put donner comme officier du génie et directeur des fortifications de Saint-Domingue[2].

D’après ces affirmations, nous doutons de l’assertion de M. Madiou qui prétend que Vincent adressa à T. Louver-

  1. Mémorial de Sainte-Hélène, par Las Cases.
  2. Montholon, t. 1er. À cette occasion, Napoléon détruit les imputations de Pamphile de Lacroix, relatives à l’exil de Vincent à l’île d’Elbe. Il affirme que cet officier, devenu suspect par rapport à ses opinions en faveur de T. Louverture, témoigna lui-même le désir d’être employé dans un pays chaud, et qu’il obtint la direction des fortifications de la Toscane. Il se plaisait, dit-il, à Florence, où il maria une de ses filles. P. de Lacroix a commis plus d’une erreur.