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Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 6.djvu/310

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Loin de faire la moindre résistance, Moreau répliqua : « Mon beau sabre vous fait envie, sans doute ; eh bien ! prenez-le. Mais, vous ne vous rappelez donc pas tous les malheurs que le Sud a éprouvés dans la guerre civile entre les généraux Rigaud et Toussaint Louverturè, quand vous vous armez contre l’empereur ?[1] » Arrêté, désarmé, il fut conduit sur l’habitation Taverne, où Messeroux et sa bande campèrent : dans la journée, de nombreux habitans et cultivateurs se joignirent à eux, en vociférant contre Dessalines. La nouvelle parvenant sur toutes les habitations, de proche en proche, toute la commune du Port-Salut, celle de Torbeck et la plaine des Cayes participèrent au mouvement insurrectionnel dans la nuit. Le peuple des campagnes était debout ! Il souffrait tant !…

Aussitôt que Moreau eut été amené à Taverne, Messeroux avait envoyé aux Cayes l’un des conjurés, nommé Beauchamp, qui y donna la nouvelle de son arrestation, comme s’il n’y avait pas participé : il arriva à 3 heures de l’après-midi. L’adjudant-général Papalier, commandant de l’arrondissement, fit battre la générale immédiatement : à 5 heures, toutes les troupes de la garnison étaient réunies sur la place d’armes. Les esprits avaient reçu la commotion électrique à laquelle ils s’attendaient par pressentiment[2].

Papalier se rendit sur la place ; il annonça aux troupes l’arrestation de Moreau, en les haranguant, surtout la 13e demi-brigade dont ce général avait été le colonel,

  1. Notes de Pilié, sur la déclaration de Moreau.
  2. Cependant, la pièce intitulée Relation de la campagne contre la tyrannie, publiée ensuite au Port-au-Prince, dit que « Moreau et Etienne Mentor furent arrêtés par les ordres du brave colonel Wagnac. » Il y aurait donc eu concert entre le colonel Wagnac et Messeroux !