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Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 6.djvu/538

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du langage hypocrite de Toussaint Louverture, qui ont fait croire et répéter que cette guerre ne fut qu’une opposition entre noirs et mulâtres, une lutte de couleurs et de castes. Des étrangers, imbus des principes du système colonial qui tend toujours à diviser ces deux branches de la race noire, intéressés par conséquent à les voir admis en Haïti pour l’énerver et empêcher son développement, se seraient bien gardés de ne pas accréditer cette erreur. Des Haïtiens même l’ont accueillie sans réflexion, lorsqu’ils devraient se pénétrer des causes réelles des luttes antérieures de leur pays, pour ne pas devenir les instrumens ou les victimes de cette politique toute coloniale.

Cette adresse du Sénat fut signée par 20 membres présens au Port-au-Prince, y compris Thimoté qui ne tarda pas à partir pour se rendre au Port de-Paix, son domicile, afin d’y exciter une insurrection contre Christophe. Pétion s’entendit avec lui à ce sujet, pour réveiller dans toute la péninsule du Nord les anciens principes que Lubin Golard y avait semés, en 1799, en faveur du parti de Rigaud ; et il fut convenu qu’aussitôt son départ, le Sénat le déclarerait déchu, par sa fuite apparente, et le remplacerait.

Le 27 janvier, trois jours après la publication de cette adresse, le Sénat se vit dans la nécessité d’agir dans le vrai de la situation des choses. Une proclamation de Christophe, en date du 14, était parvenue au Port-au-Prince ; elle essayait de fomenter la division parmi les républicains. Le Sénat publia un arrêté qui le mit hors la loi, en invitant tous les citoyens à lui courir sus, après l’avoir destitué de toutes fonctions civiles et militaires : il déclara les citoyens, en général, dégagés de toute obéissance envers