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Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 7.djvu/406

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même impassibilité qu’il avait mise à lire l’arrêté du général Leclerç, qui déporta Rigaud en France et qui, le rendant désormais chef de son parti politique, lui fit prendre la résolution de conduire ce parti à l’indépendance de Saint-Domingue. Mais quand il arriva à l’accusation qui le comparait à Christophe, ses traits s’animèrent etil dit : « Ah ! le général Rigaud ne suit que les inspirations de la haine que m’a vouée M. Blanchet ! Il a consenti à me comparer à Christophe ! Eh bien ! je veux entrer aux Cayes en panlouffles ! »[1]

Après la publication de l’adresse du Sud, les réfugiés de l’Ouest principalement, et bon nombre de citoyens scissionnaires, ne gardèrent plus aucune mesure dans leurs propos à l’égard de Pétion ; le général en chef en avait donné le signal par ses accusations. Aux Cayes, à Jérémie, à Aquin, à Miragoane, dans tous les bourgs du Sud, c’était un concert de réprobation contre le Président de la République : était exactement renseigné de ces divagations passionnées, par ses partisans secrets.

Il se devait à lui-même, il le devait au pays, d’y faire répondre dans la même forme. En conséquence, une « adresse des citoyens de l’Ouest à leurs frères du Sud » fut rédigée par Sabourin[2]. Ceux du Port-au-Prince furent convoqués au palais de la présidence, afin d’en entendre la lecture ; ils y adhérèrent sans hésitation et apposèrent leurs signatures, tout en déplorant l’acrimonie contenue dans celle du Sud, qui nécessitait cette réponse formulée avec modération et fermeté : les noms des militaires s’y confondirent avec ceux des citoyens de la

  1. Mon père était présent, quand Pétion prononça ces paroles, et je les tiens de lui.
  2. Je le sais, pour avoir vu Sabourin à l’imprimerie nationale, où il vint corriger les épreuves : il y avait peu de temps que mon père m’y avait placé, pour apprendre le métier d’imprimeur.