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Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 7.djvu/551

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suivre l’ennemi sur la route de Saint-Marc ; mais arrivé près de Sibert, il ordonna la contre-marche pour rentrer en ville : dans l’après-midi, toute l’armée y était rendue.

En voyant Borgella, Pétion lui avait dit son intention à ce sujet : « Tous les officiers supérieurs, lui dit-il, toutes les troupes paraissent désirer que je poursuive l’ennemi qui s’enfuit au pas de course ; mais je n’en ferai que le simulacre. Je veux ménager le sang de mes concitoyens ; nos pertes ont été assez grandes déjà depuis le commencement de notre guerre civile. La défection qui vient de s’opérer dans l’armée de Christophe, doit prouver que sa puissance est ébranlée ; le temps achèvera de l’abattre : désormais, il n’osera plus marcher contre nous. Cicatrisons nos plaies ; employons toutes nos facultés à procurer au peuple, la plus grande somme de bonheur et de prospérité possible : c’est là le devoir du gouvernement, et ce sera aussi la plus belle bataille que nous pourrons livrer au tyran qui opprime les populations soumises à ses ordres[1]. »

Quelle sagesse et quelle intelligence dans cette politique basée sur l’humanité ! Quel patriotisme en même temps de la part de ce grand citoyen ! Comme il jugeait bien des événemens récemment arrivés, du présent et de l’avenir de sa patrie !

La défection de la flottille du Nord avait prouvé l’influence des sentimens humains sur les cœurs ; la fin de la scission du Sud, celle d’une conduite modérée ; la défection des troupes sous les remparts du Port-au-Prince,

  1. Notes biographiques dictées par Borgella.