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Page:Argens - Mémoires du marquis d’Argens.djvu/155

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Peu de jours après, les comédiens partirent pour aller à Nîmes passer le temps des vacances du parlement, la ville dans ce temps-là ne pouvant soutenir un spectacle. J’avais résolu de prendre ce temps pour finir entièrement mes affaires avec Sylvie. Je comptais, lorsqu’elle serait en Languedoc, de l’épouser en secret : un prêtre que j’aurais gagné pour quelque argent, eût fait cette cérémonie. Je voulais lui faire quitter la comédie ; elle eût vécu dans quelque maison de campagne auprès d’Aix, et j’aurais attendu la mort de mes parens pour déclarer mon mariage. Mais le ciel qui me préparait un torrent de malheurs en disposa autrement.

Quelque temps après que Sylvie fut partie, elle eut une nouvelle dispute avec sa mère, qui lui reprocha de l’avoir surprise avec moi. C’était frapper son cœur par l’endroit sensible ; aussi sortit-elle de chez sa mère. J’en fus fort surpris lorsque j’arrivai à Nîmes ; je lui en témoignai mon chagrin. Elle se plaignit si fort des manières qu’elle avoit essuyées que, connaissant d’ailleurs son caractère, je ne doutai point qu’elle n’eût raison.

Il y avait deux ou trois jours que j’étais en Languedoc. Tout était résolu ainsi que