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Page:Argens - Mémoires du marquis d’Argens.djvu/183

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combien il méritait ma tendresse. Mon père lui ayant offert, s’il voulait quitter la croix de Malte, de le faire l’aîné, il l’avait refusé constamment. Son amitié pour moi ne s’est jamais démentie, et, dans les malheurs qui me sont arrivés, elle a été la seule chose qui m’ait apporté quelque consolation ; il m’apprit que ma mère aurait fort souhaité de me voir, mais que mon père s’y était fortement opposé ; elle avait alors une tendresse infinie pour moi ; elle n’avait pas peu, contribué à faire consentir mon père à la révocation de ma lettre de cachet : bien plus, comme il se plaignait beaucoup de la dépense que je lui avais causée, ma mère lui offrit de vendre ses diamans. Son amitié pour moi a bien changé dans la suite ; il semble que c’est mon destin d’être rendu malheureux par les personnes qui m’ont le plus aimé.

Après avoir pris congé de mon frère, je partis pour Toulon ; mon père y vint quelques jours après. Monsieur l’ambassadeur me mena chez lui ; il me parla assez doucement, me représenta le tort que je m’étais fait dans le monde, et finit par me dire qu’il souhaitait que ma conduite fit oublier au public ma sottise autant qu’il l’avait déjà oubliée. Je ne