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Page:Argens - Mémoires du marquis d’Argens.djvu/24

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imbécille, il est aisé de voir qu’un homme à qui l’on suppose de la philosophie, c’est-à-dire de la raison et des sentimens de justice, se garderait bien de mettre en pratique quelques maximes douteuses que l’on soutient par manière de disputes ; qu’il ne se hasarderait pas à compromettre la sûreté de l’état et le bonheur des familles pour faire des essais d’Utopie ; qu’un philosophe ne sacrifierait pas non plus ni l’un ni l’autre à l’ambition, à la vaine gloire, aux intérêts de famille et à son goût pour les conquêtes. Frédéric n’a point cessé d’être un très-grand roi, quoiqu’il fût philosophe, et même athée ; ce qui n’est point du tout un attribut de la philosophie : il fit la guerre ; mais la sottise et le fanatisme des opinions, des religions ou des mœurs ne tourmentèrent pas ses états. Ainsi les plaisanteries contre les philosophes, sous le rapport des lois et du gouvernement, posent sur un principe faux, sur une supposition tirée d’exemples de fous, mus par des passions viles ou meurtrières, et non pas ; de sages et d’hommes attachés à la raison et à la justice. Revenons au marquis d’Argens.

Ce fut encore dans un autre souper que les mêmes convives, s’appuyant sur la déclaration faite par Frédéric, qu’il n’y avait point