Page:Aristote - Poétique et Rhétorique, trad. Ruelle.djvu/281

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Ainsi, par exemple, quand on exhorte à braver un danger des gens qui n’ont pas sacrifié :

Le seul augure vraiment bon, c’est de se battre pour son pays [1] ;

ou des gens qui sont plus faibles que l’ennemi :

Mars est pour les uns comme pour les autres [2] ;

ou (pour exhorter) à faire périr les enfants des ennemis, bien qu’inoffensifs :

Insensé celui qui, après avoir tué le père, laisserait vivre les enfants[3].

XII. Il y a, en outre, quelques proverbes qui sont en même temps des sentences ; celui-ci, par exemple : « Voisin athénien[4]

XIII. Il faut encore énoncer des sentences pour réfuter les dictons qui sont dans le domaine public (je nomme ainsi, par exemple, le mot : « Connais-toi toi-même »), ou « Rien de trop, » lorsque le caractère moral (de l’orateur) doit en paraître meilleur, ou que l’on s’est exprimé avec passion. Or on s’exprime avec passion si, transporté de colère, on déclare qu’il est faux qu’on doive se connaître soi-même ; c’est-à-dire que, si (l’adversaire) s’était connu lui-même, il n’aurait jamais eu la prétention de conduire une armée. Le caractère moral sera présenté comme meilleur si l’on avance qu’il ne faut pas, comme on le dit, aimer comme si l’on devait haïr un jour, mais plutôt haïr comme si l’on devait aimer.

XIV. Il faut manifester ses intentions en termes

  1. Hom., Il., XII, 143. Cp. Cic., De senectute, § 4.
  2. Hom., Il., XII, 143. Cp. Cic., De senectute, § 4.
  3. Cp. ci-dessus, liv. I. chap. XV, § 14.
  4. C’est-à-dire dangereux ou incommode.