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Page:Aristote - Poétique et Rhétorique, trad. Ruelle.djvu/284

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niers remplissent leurs discours de lieux communs et de généralités, tandis que ceux-là tirent leurs arguments de ce qu’ils savent et restent dans la question. Aussi faut-il parler non pas d’après les vraisemblances, mais d’après des faits déterminés, par exemple, dans l’esprit des juges ou des personnes qu’ils acceptent (comme compétentes)[1] ; et dire ce qui paraît évident à tout le monde, ou au plus grand nombre. Il ne faut pas conclure seulement d’après les choses nécessaires, mais, en outre, d’après ce qui a lieu le plus souvent.

IV. En premier lieu, par conséquent, il faut comprendre que, relativement au point sur lequel on doit parler et argumenter au moyen d’un syllogisme, politique ou de toute autre nature, il est nécessaire de posséder dans tous ses détails, ou dans quelques-uns, la question qui s’y rapporte ; car, n’étant en possession d’aucun de ces détails, tu ne pourrais en tirer aucune conclusion.

V. Je m’explique : comment, par exemple, pourrions-nous conseiller aux Athéniens de faire ou de ne pas faire la guerre, sans savoir quelles sont leurs ressources en marine, en armée de terre, ou dans l’une et l’autre ; quel est l’effectif, quels sont les revenus, les alliés, les ennemis ; et encore, quelles guerres ils ont soutenues, dans quelles conditions, et tant d’autres questions analogues ?

VI. Comment faire leur éloge, si nous ignorions le combat naval de Salamine, ou la bataille de Marathon, ou leurs exploits pour secourir les Héraclides, ou quelque autre des faits de ce genre ? Car c’est toujours sur de belles actions, réelles ou apparentes, que repose un éloge.

  1. Cette interprétation est justifiée par un passage qu’on lit plus loin (chap. XXIII, § 12).