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Page:Arnauld et Nicole - Logique de Port-Royal, Belin, 1878.djvu/150

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CHAPITRE VI

De la nature des propositions incidentes, qui font partie des propositions complexes[1].


Mais, avant que de parler des propositions dont la complexion tombe sur la forme, c’est-à-dire sur l’affirmation ou la négation, il y a plusieurs remarques importantes à faire sur la nature des propositions incidentes, qui font partie du sujet ou de l’attribut de celles qui sont complexes selon la matière.

1o On a déjà vu que ces propositions incidentes sont celles dont le sujet est le relatif qui : comme, les hommes qui sont créés pour connaître et pour aimer Dieu, ou les hommes qui sont pieux : ôtant le terme d’hommes, le reste est une proposition incidente.

Mais il faut se souvenir de ce qui a été dit dans le chapitre VIII de la première partie, que les additions des termes complexes sont de deux sortes : les unes qu’on peut appeler de simples explications, qui est lorsque l’addition ne change rien dans l’idée du terme, parce que ce qu’on y ajoute lui convient généralement et dans toute son étendue, comme dans le premier exemple, les hommes qui sont créés pour connaître et pour aimer Dieu.

Les autres qui peuvent s’appeler des déterminations, parce que ce qu’on ajoute à un terme ne convenant pas à ce terme dans toute son étendue, en restreint et en détermine la signification, comme dans le second exemple, les hommes qui sont pieux. Suivant cela, on peut dire qu’il y a un qui explicatif et un qui déterminatif.

Or, quand le qui est explicatif, l’attribut de la proposition incidente est affirmé du sujet auquel le qui se rapporte, quoique ce ne soit qu’incidemment au regard de la proposition totale, de sorte qu’on peut substituer le sujet même au qui, comme on peut voir dans le premier exemple : les hommes qui ont été créés pour connaître et pour aimer Dieu, car on peut dire : les hommes ont été créés pour connaître et pour aimer Dieu.

Mais quand le qui est déterminatif, l’attribut de la proposition incidente n’est point proprement affirmé du sujet auquel le qui se rapporte ; car si, après avoir dit les hommes qui sont pieux sont charitables, on voulait substituer le mot d’hommes au qui, en disant les hommes sont pieux, la proposition serait fausse, parce que ce serait affirmer le mot de pieux des hommes comme hommes ; mais en disant, les hommes qui sont pieux sont charitables, on n’affirme ni des hommes en général, ni

  1. Ce chapitre forme, avec le précédent, un véritable traité d’analyse logique.