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Page:Audoux - L Atelier de Marie Claire.djvu/144

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Ma vieille voisine était devenue aussi ma compagne d’atelier. Sa vieillesse et sa faiblesse avaient si fort apitoyé Mme Dalignac, qu’elle s’était engagée à l’employer d’un bout de l’année à l’autre, sans souci du travail qu’elle pourrait fournir, ni des heures qu’elle donnerait en moins. Son arrivée avait apporté du mécontentement aux autres, et il nous fallut l’installer dans la pièce de coupe où elle vint encore augmenter l’encombrement.

Pas plus que les ouvrières, le patron ne regardait la pauvre vieille d’un air aimable. Et Duretour, que personne ne gênait à l’ordinaire, m’avait dit avec une grimace :

— En voilà une idée d’amener ici une femme de l’ancien temps.

Cependant Mlle Herminie ne fut pas longue à gagner les sympathies. Sa franchise brusque et le ton d’égalité qu’elle prit avec chacun, plut vite au patron et attira l’attention des autres qui la rappelèrent dans l’atelier comme une jeune camarade. Ses comparaisons inattendues et ses récits pleins d’exagération étonnaient et amusaient.

Sa voix m’était si familière que, la plupart du temps, je n’en retenais que le son. Mais lorsque je voyais le patron s’approcher pour écouter, je prêtais l’oreille aussi.

Un jour, j’entendis :

— Arrivés dans la vigne, les garçons offrirent la main aux filles pour les aider à descendre de la charrette, mais moi qui ne faisais jamais rien