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Page:Audoux - La Fiancee.djvu/154

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daient les gens aussi longtemps qu’elles pouvaient les apercevoir, puis elles cessaient d’appeler, comme si elles comprenaient que le moment de la délivrance n’était pas encore venu.

Paul s’était surtout attaché aux poulains qui gambadaient à travers l’île. Son préféré était un tout petit dont le poil très blond avait des reflets roses. La veille encore il s’était arrêté longtemps à le regarder. C’était à l’heure du soleil couchant. Le poulain galopait en faisant des grâces : il baissait et relevait la tête, comme s’il saluait le gros soleil rouge qui se couchait dans l’eau. Ensuite il se cabrait en essayant de se tenir debout, ou bien il lançait avec vigueur ses pieds de derrière dans le vide. Puis il recommençait à tracer des cercles de plus en plus larges autour de sa mère, sans arrêter un seul instant son trot balancé et joli comme une danse. Mais, ce matin, Paul eut beau courir le long des rochers et sur la lande, il vit les mêmes vaches et les mêmes moutons, retenus par une corde, mais nulle part il ne vit de poulains. Il ne savait à quoi attribuer cela, et il revint tout