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Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome II.djvu/62

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saint Pierre jusqu’à Anastase, qui occupe aujourd’hui le même siège, s’il s’était glissé quelque évêque traditeur, il n’en serait résulté aucun préjudice contre l’Église ni contre les chrétiens innocents ; c’est à eux que, dans sa prévoyance, le Seigneur a dit au sujet des mauvais pasteurs : « Faites ce qu’ils disent, ne faites pas ce qu’ils font, car ils disent et ne font pas[1]. » Pour que l’espérance du fidèle soit certaine, cette espérance qui ne se place pas dans l’homme, mais dans le Seigneur, il ne faut pas qu’elle soit jamais dissipée par la tempête d’un schisme sacrilège ; ils ont été ainsi dissipés ceux qui lisent dans les saints livres les noms des Églises auxquelles les apôtres ont écrit, sans avoir là aucun évêque. Quoi de plus détestable et de plus insensé que de dire aux lecteurs qui viennent de lire ces mêmes Épîtres : la paix soit avec vous, et d’être séparé de la paix de ces mêmes Églises auxquelles les Épîtres sont adressées !

4. Cependant, de peur que le prêtre donatiste ne se flatte de la suite des évêques de Constantine qui est vôtre ville, lisez-lui les actes de Munatius Félix, flamine perpétuel, préposé à la garde de votre cité, pendant que Dioclétien était consul pour la huitième fois, et Maximien pour la septième, le onze des calendes de juin ; il est clairement constaté par ces actes que l’évêque Paul livra les livres saints, ayant Sylvain pour sous-diacre et pour complice, et que celui-ci livra en même temps des objets d’église, même ceux qu’on avait cachés avec le plus de soin, tels qu’une boîte d’argent et une lampe d’argent, si bien qu’un certain Victor lui dit : Vous en seriez mort si vous ne les aviez pas trouvées. – C’est ce même Sylvain, si manifestement traditeur, dont le prêtre donatiste, dans la lettre qu’il vous écrit, rappelle avec bonheur l’ordination par les mains de Sécondus, évêque de Tigisis, alors primat. Que leur langue orgueilleuse se taise donc, qu’elle reconnaisse leurs propres crimes, et que, dans son délire, elle cesse de dénoncer les prétendus crimes d’autrui. Lisez aussi à ce prêtre donatiste, s’il veut vous entendre, les actes ecclésiastiques de ce même Sécondus, évêque deTigisis, dans la maison d’Urbain Donat, où il laissa au jugement de Dieu les traditeurs qui avouaient leur crime Donat, évêque de Masculi ; Marin, évêque des Eaux de Tibilis ; Donat, évêque de Calame ; ce fut avec ces traditeurs que Sécondus ordonna évêque le traditeur Sylvain, dont nous avons parlé tout à l’heure. Lisez encore à ce prêtre qui vous a écrit, lisez-lui ce qui se passa devant Zénophile, personnage consulaire ; ce fut là qu’un diacre nommé Nundinarius, irrité contre Sylvain qui l’avait excommunié, découvrit judiciairement toutes ces choses et les prouva d’une façon plus claire que le jour par les déclarations certaines et les réponses des témoins, par la lecture des actes et de beaucoup de lettres.

5. Que de choses vous pourriez lui lire encore si, au lieu d’un disputeur opiniâtre, vous trouviez en lui un esprit sagement disposé à vous écouter ! Vous lui remettriez sous les yeux les prières des donatistes à Constantin pour qu’il envoyât des Gaules des évêques qui jugeraient la cause débattue parmi les évêques d’Afrique ; les lettres du même empereur par lesquelles il envoya des évêques à Rome ; le récit de ce qui se passa à Rome, où la cause fut connue et discutée par ces évêques ; les lettres où l’empereur annonce que les évêques donatistes se sont plaints du jugement de leurs collègues, c’est-à-dire des évêques que Constantin avait envoyés à Rome ; les lettres où il voulut que d’autres évêques se réunissent à Arles pour juger une seconde fois, où il est dit que les donatistes en appelèrent encore de ce jugement à l’empereur lui-même ; que l’empereur examina l’affaire et prononça en présence des parties, et qu’il témoigna violemment la plus grande horreur contre les donatistes en voyant l’innocence de Cécilien sortir triomphante de leurs accusations. Le prêtre qui vous a écrit entendra tout cela s’il veut, et ne parlera plus et cessera de tendre des pièges à la vérité.

6. Du relate, nous nous appuyons moins sur de pareils témoignages que sur les saintes Écritures, qui promettent le monde entier au Christ, pour être son héritage ; les donatistes s’en étant séparés par un schisme criminel, ils font grand bruit de crimes qui seraient comme la paille dans la moisson du Seigneur : il faut souffrir qu’elle reste mêlée au grain jusqu’à ce que, par le dernier jugement, l’aire tout entière soit vannée. Ces crimes, vrais ou faux, ne font rien au froment du Seigneur qui doit croître jusqu’à la fin des siècles, dans le champ tout entier, c’est-à-dire dans le monde ce n’est pas le faux ange du prêtre donatiste

  1. Matt. XXIII, 3