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Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome V.djvu/193

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reste, jusqu’à l’endroit où nous lisons : « Ce que vous délierez sur la terre sera aussi délié dans le ciel[1]. » Saint Marc rapporte le même événement à-peu-près dans le même ordre ; mais il expose auparavant un fait dont lui seul a parlé, savoir, la guérison de cet aveugle qui répondit au Seigneur : « Je vois les hommes qui marchent semblables à des arbres[2]. » C’est après avoir parlé du miracle des cinq pains que saint Luc rappelle à sa mémoire et rapporte la question du Sauveur et la réponse des disciples[3]. Mais en suivant l’ordre de ses souvenirs, il ne contredit nullement l’ordre des autres évangélistes. On pourrait, il est vrai, se demander comment, d’après saint Luc, le Seigneur priait et se trouvait seul avec ses disciples quand il leur demanda ce que les hommes disaient de lui ; tandis que selon saint Marc ; ce fut dans le chemin. Mais ceci n’est une difficulté que pour celui qui ne prie jamais en marchant.

109. J’ai, du reste, il m’en souvient, averti plus haut le lecteur de ne pas croire que Simon reçut le nom de Pierre quand Jésus lui dit : « Tu es Pierre et sur cette Pierre je bâtirai mon Église[4]. » Car il est certain que ce nom lui fut donné lorsque, d’après saint Jean, le Sauveur lui dit : « Tu t’appelleras Céphas ; c’est-à-dire Pierre[5]. » Il ne faut donc pas croire non plus que ce fut au moment où en rappelant les noms des douze Apôtres, saint Marc dit que Jacques et Jean furent appelés fils du tonnerre[6]. C’est bien là que l’évangéliste parle du nom de Pierre donné à Simon ; mais il le dit parce qu’il se le rappelle et non parce que le fait vient d’avoir lieu.

CHAPITRE LIV. LA PASSION PRÉDITE.

110. On lit ensuite dans saint Matthieu ; « En même temps Jésus défendit à ses disciples de dire à personne qu’il fût le Christ. Puis il commença à leur découvrir qu’il lui fallait aller à Jérusalem et y souffrir beaucoup de la part des anciens et des docteurs de la loi ; » et le reste, jusqu’à ces mots : « Tu ne goûtes point les choses de Dieu, mais celles des hommes[7]. » Saint Marc et saint Luc rapportent les mêmes faits dans le même ordre[8] : seulement saint Luc omet de dire que Pierre s’opposa à la passion du Christ.

CHAPITRE LV. SUIVRE LE CHRIST.

111. Saint Matthieu continue ainsi : « Alors Jésus dit à ses disciples : Si quelqu’un veut venir après moi, qu’il renonce à lui-même, se charge de sa croix et me suive : » et le reste, jusqu’à ces mots : « Et il rendra à chacun selon ses œuvres[9]. » Ceci est exposé par saint Marc dans le même ordre : mais cet évangéliste ne relève pas ce qui est dit du Fils de l’homme, qu’il doit venir avec ses anges pour rendre à chacun selon ses œuvres. Pourtant il nous fait lire dans le discours de Notre-Seigneur : « Quiconque aura rougi de moi et de ma parole au milieu de cette nation adultère et corrompue, le Fils de l’homme de son côté rougira de lui quand il viendra dans sa gloire accompagné des saints anges[10]. » Ce qu’on peut rapporter à cette pensée du texte de saint Matthieu. « Alors le Fils de l’homme rendra à chacun selon ses œuvres. » Saint Luc aussi rapporte tout cela dans le même ordre. Il diffère peu de saint Marc dans la forme du récit : et quant au fond il n’en diffère nullement[11].


CHAPITRE LVI. TRANSFIGURATION.

112. Saint Matthieu poursuit ainsi : « Je vous le dis en vérité, plusieurs de ceux qui m’entendent ne goûteront point la mort qu’ils n’aient vu le Fils de l’homme venir en son règne. Six jours après ; Jésus prit avec lui Pierre, Jacques et Jean son frère et les mena à l’écart sur une haute montagne ; » et le reste, jusqu’à l’endroit où nous lisons : « Ne parlez à personne de ce que vous venez de voir, avant que le Fils de l’homme soit ressuscité d’entre les morts[12]. » Cette transfiguration du Seigneur sur une montagne, devant les trois disciples, Pierre, Jacques et Jean, avec le témoignage que lui rendit la voix de son Père, se trouve également racontée par les trois évangélistes, dans le même ordre et saris nulle différence pour le fond[13]. D’après ce que nous avons dit et répété plusieurs fois, on peut en lisant les trois récits remarquer que les expressions différentes ne changent rien aux pensées.

  1. Mat. 16, 13-19
  2. Mrc. 8, 22-29
  3. Luc. 9, 18-20
  4. Mat. 16, 18
  5. Jn. 1, 42
  6. Mrc. 3, 16-19
  7. Mat. 16, 20-23
  8. Mrc. 8, 30-33 ; Luc. 9, 21,22
  9. Mat. 16, 24-27
  10. Mrc. 8, 34-38
  11. Luc. 9, 23-26
  12. Mat. 16, 28 ; 17, 9
  13. Mrc. 8, 39 ; 9, 9 ; Luc. 9, 27-36