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Page:Augustin Crampon - Les quatre Evangiles, Tolra et Haton, 1864.djvu/412

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du Verbe ; ce qui est raconté à ce sujet se réduisait pour eux à une simple apparence : de là leur nom grec de docètes. On croit que l’apôtre avait en vue les docètes lorsqu’il enseigne, au chapitre 1er, que le Verbe s’est fait chair, et atteste, au chapitre xix, que l’eau et le sang sortirent du côté de Notre-Seigneur. Parmi les hérétiques combattus par saint Jean, il faut compter aussi les ébionites[1], secte de chrétiens judaïsants, qui conservaient pour la loi ancienne un respect exagéré, et estimaient Moïse à l’égal de Jésus-Christ. Ajoutez les sabiens[2], ou disciples de Jean-Baptiste, qui, refusant à Jésus la qualité de Messie, rendaient les plus grands honneurs au Précurseur.


La date de l’apparition de ces hérésies nous fournit un premier indice de l’époque où fut composé le quatrième Évangile, et cet indice est d’accord avec la tra-

  1. Il est probable, dit M. Héfélé, que le nom d’ébionites, c’est-à-dire les pauvres, était porté dès le commencement par tous les chrétiens qui émigrèrent de Jérusalem à l’approche des armées romaines et se réfugièrent dans la Pérée et dans la Syrie (comp. Act. ii, 44, 45) ; mais ce nom, vulgaire d’abord, fut revendiqué dorénavant par les judaïsants séparés des autres chrétiens et associés aux esséniens, parce qu’ils attachaient une importance spéciale à la pratique de la pauvreté ; et c’est ainsi qu’ils transformèrent cet ancien titre d’honneur, en un nom d’un parti hérétique. — Faut-il ranger les ébionites parmi les gnostiques ? Nous croyons que plusieurs joignaient à leur système des éléments théosophiques empruntés aux religions et aux systèmes philosophiques de l’Orient, et se rattachaient soit au dualismne, d’où leur horreur pour la matière ; soit à l’émanation, d’où leurs généalogies et leurs angélologies (Coloss. ii, 18, 21 ; I Tim. i, 4 ; iv, 3-5 ; Tit. i, 14, 15 ; iii, 9).
  2. Le mot sabiens ou zabiens est synonyme de baptistes. Les restes de cette secte subsistent encore de nos jours près de Laodicée et dans les montagnes du Liban, sous le nom de chrétiens de saint Jean ; on les appelle aussi mendaïtes, c’est-à-dire gnostiques, ce qui indique suffisamment leur origine. Voici les principaux passages du quatrième Évangile dirigés contre les sabiens : i, 8, 19 sv. ; iv, 32, 34 ; v, 17 sv. 36 ; viii, 12 ; ix, 5, 35, etc.