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Page:Augustin Crampon - Les quatre Evangiles, Tolra et Haton, 1864.djvu/493

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Iscariote, qui devait le trahir, dit[1] : Pourquoi n’a-t-on pas vendu ce parfum trois cents deniers, qu’on aurait donnés aux pauvres ? Il dit cela, non qu’il se souciât des pauvres, mais parce qu’il était voleur, et qu’ayant la bourse, il portait[2] ce qu’on mettait dedans. Jésus donc lui dit : Laissez-la accomplir ce devoir en vue de ma sépulture[3]. Car vous avez toujours des pauvres avec vous ; mais moi vous ne m’avez pas toujours[4]. Une grande multitude de Juifs surent qu’il était là, et ils

  1. Nous savons par saint Matth. et saint Marc que d’autres disciples partageaient, à un certain degré, le mécontentement de Judas.
  2. En grec, dérobait, ce qui parait être la véritable signification de ce passage. Le P. Patrizzi dit que le mot portait, dans la Vulgate, est employé par ironie dans le même sens. « Ce n’était pas un besoin spirituel, un noble intérêt qui avait associé Judas au Christ ; il n’était poussé que par la cupidité la plus vulgaire : il espérait une riche récompense de la part qu’il prendrait à l’œuvre du Messie telle qu’il se la figurait. Mais, plus il s’apercevait que ses espérances mondaines étaient illusoires, plus il devenait indifférent à l’égard de Jésus, et cette indifférence se transforma bientôt en haine, à mesure que la sainteté de la doctrine et de la vie du Christ irrita davantage ce cœur dominé par l’avarice. Il conçut enfin la pensée de se ranger parmi les ennemis du Seigneur, espérant trouver au moins de cette manière un profit de ses rapports avec le Sauveur. Poussé par le diable, qui s’était emparé de son cœur, il parut devant les membres du Sanhédrin qui venait de tenir conseil sur l’arrestation et l’exécution de Jésus, et la faible somme de trente sicles décida sa trahison. Cependant sa résolution n’était pas complétement arrêtée encore, et ce ne fut que lorsqu’il vit que son projet était découvert, pendant la cène pascale, que, s’abandonnant tout entier à sa pensée déicide, il quitta les Apôtres et se mit à la disposition du Sanhédrin. » Ad. Maier.
  3. En grec, laissez-la ; elle l’a réservé pour le jour de ma sépulture ; ce que le P. Patrizzi explique ainsi : Ce parfum, elle ne l’a point répandu inutilement, comme vous le pensez ; mais elle a fait la même chose que si elle l’avait réservé pour oindre mon corps avant la sépulture. Cette pieuse femme avait un pressentiment que Jésus ne serait plus longtemps sur la terre, et elle aime mieux lui donner, vivant ce témoignage de son amour, que d’attendre sa mort, dans la crainte d’en être empêchée alors par quelque obstacle.
  4. Vous n’avez qu’un court espace de temps pour me rendre ces devoirs.