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Page:Augustin Crampon - Les quatre Evangiles, Tolra et Haton, 1864.djvu/553

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buait aux convives avec du pain azyme trempé dans le charoseth. Le repas fini, il leur présentait la troisième coupe de vin, appelée spécialement coupe de bénédiction, parce qu’on rendait alors à Dieu des actions de grâces pour la cène pascale que l’on venait de faire. Après avoir récité la dernière partie du Hallel, les psaumes cxv-cxviii, on vidait la quatrième coupe, quelquefois une cinquième, mais rien de plus.

Tels sont, à notre avis, les véritables principes de solution : combiner avec les données certaines de l’Évangile les usages des Juifs dans la manducation de l’agneau pascal. D’après cela, il nous semble 1o que le lavement des pieds eut lieu au commencement du repas pascal, soit en entrant dans le cénacle et avant la bénédiction de la première coupe, soit plutôt après l’instruction sur la Pâque faite par le père de famille, alors que la table était retirée ; — 2o qu’il faut placer la consécration du pain après la récitation de la première partie du Hallel, lorsqu’on se remit à table pour le repas pascal proprement dit ; — 3o que la consécration du calice se fit, comme le dit saint Luc, après le repas, par conséquent, que Notre-Seigneur consacra une des trois dernières coupes, plus probablement la troisième des cinq, appelée coupe de bénédiction, ou d’actions de grâces ; — 4o que Judas, qui avait brusquement quitté le cénacle avant la fin du repas, ne communia que sous l’espèce du pain. — Quant aux diverses prédictions de la trahison de Judas racontée par les Évangélistes, rien n’empêche d’en placer une avant la consécration du pain, et une autre ou les autres pendant le repas pascal. — Enfin il est probable que la dispute sur la préséance, mentionnée par saint Luc (xxii, 24 ; 30), précéda ou suivit immédiatement le lavement des pieds.

Crucifiement. — Le supplice de la croix paraît avoir été inconnu à la loi mosaïque ; car la suspension des coupables à un poteau n’a rien de commun avec le crucifiement, puisqu’elle n’avait lieu qu’après l’exécution, en signe de honte infligée au cadavre (Nomb. xxv, 4 sv. Deut. xxi, 22 sv.) : ce qui rend d’autant plus étonnante cette circonstance, qu’un Psaume tout entier, le Psaume xxi, relatif aux souffrances du Messie, décrit précisément ce supplice. Emprunté aux Romains par les derniers princes asmonéens, le crucifiement resta en usage chez les Juifs sous les Hérodes et durant la domination romaine.

Les Romains avaient retiré aux tribunaux juifs le droit de faire exécuter une sentence de mort. Le sanhédrin, il est vrai, pouvait prononcer une sentence capitale conformément aux lois judaïques ; mais ce n’était plus que pour la forme, car le procurateur romain recommençait l’instruction, procédait à un nouveau jugement, et appliquait lui-même, s’il y avait lieu, la peine de mort. C’est par suite de la situation politique où se trouvait alors la Judée, que Jésus, qui devait être livré au procurateur Pilate et ne pouvait être condamné que par lui, subit le crucifiement ; accusé de blasphème devant le sanhédrin, il aurait été, suivant la loi mosaïque, condamné à être lapidé.

Le crucifiement était considéré chez les Romains comme la peine capitale la plus dure et la plus ignominieuse ; il était réservé aux