Page:Augustin Crampon - Les quatre Evangiles, Tolra et Haton, 1864.djvu/583

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erronées qu’ils se faisaient du royaume du Messie. — Kirchen-Lexicon, art. Royaume de Dieu, par Mattes.

Sadducéens. Secte juive directement opposée, aussi bien en théorie qu’en pratique, à celle des Pharisiens. Il y a deux opinions sur l’origine et le nom de cette secte. D’après les traditions rabbiniques, les Sadducéens remontent à un certain Sadoc, disciple d’Antigone de Socho, lequel présida le Sanhédrin après Simon le Juste (291-260 av. J.-C). Antigone avait enseigné que l’on doit servir Dieu et faire le bien à cause du bien, sans avoir égard à la récompense : ses disciples, Sadoc et Baithos, expliquèrent cette maxime en ce sens qu’il n’y a aucune récompense après la mort, ni même de vie future : d’où l’on appela Sadducéens ou Baithuséens ceux qui professèrent la même doctrine. D’après saint Epiphane, c’est du mot hébreux tsedek, justice, que les Sadducéens tireraient leur nom ; les membres de cette secte se seraient appelés les justes, les hommes sincèrement pieux et vertueux, par opposition au formalisme traditionnel, aux vaines observances et à la sainteté apparente des Pharisiens. Lequel de ces deux sentiments est le véritable, ou même y en a-t-il un des deux qui le soit ? on ne saurait le décider. La première opinion, celle des rabbins juifs, est relativement moderne, et n’a peut-être été inventée qu’après coup pour rattacher à des noms célèbres l’origine inconnue des Sadducéens et des Baithuséens mentionnés dans le Thalmud ; la deuxième n’a d’autre appui qu’un rapprochement étymologique ; mais elle peut cependant invoquer en sa faveur l’analogie du nom des Pharisiens (séparés), nom qui n’est pas non plus emprunté à une personne, mais qui caractérise la tendance générale de la secte. Ce qu’il y a de certain, c’est que l’existence des Sadducéens coïncide avec l’époque assignée par la tradition juive iiie siècle avant Notre-Seigneur), quoique Josèphe ne parle d’eux qu’au temps des Macchabées. Ce fut, en effet, sous la domination des Ptolémées que l’influence des idées et des mœurs helléniques commença à pénétrer en Palestine ; et cette influence, continuant sous les Séleucides, sous les Hérodes et sous les Romains, développa et confirma la tendance sadducéennc par opposition au pharisaïsme.

L’idée fondamentale du sadducéisme ressemblait fort à celle de la philosophie épicurienne, et aboutissait au matérialisme. Tout en admettant Dieu, ils rejetaient la Providence dans l’ordre moral, et isolaient de Dieu l’homme, laissé sur la terre sans aucun secours divin, sans une destinée supérieure. Ils niaient l’existence d’êtres spirituels, tels que les anges. Quant à l’âme humaine, ils ne la regardaient pas comme essentiellement distincte du corps, comme ayant une existence propre ; formée d’une matière plus subtile, elle s’éteignait avec la vie présente : par conséquent, pas de vie future, pas de récompense ou de châtiment après la mort, pas de résurrection des corps (Matth. xxii, 23 ; Marc, xii, 18 ; Luc, xx, 27). Ils admettaient cependant une révélation extraordinaire de Dieu, car les livres de l’Ancien Testament étaient pour eux, comme pour tous les Juifs, des Écritures sacrées ; mais ils rejetaient la tradition, si respectée des Pharisiens. On a répété, après saint Jérôme, qu’ils ne recevaient, du canon de