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Page:Aurel - Le nouvel art d'aimer, 1941.djvu/58

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LE NOUVEL ART D’AIMER

il ne fut jamais sans maîtresses et sans aventures ; pour finir par Éléonore Sullivan qui aimait fort Marie-Antoinette. Comment la Reine eût-elle permis cette femme à Fersen, si elle, sa souveraine avait été à lui ? Rien de plus antiféminin. Preuve surabondante. La question ne se pose pas.

Marie-Antoinette aimant Fersen ne voulait pas en faire un malheureux. Et comme eût fait toute noble femme, sûre du cœur de son ami, elle lui permettait de vivre.

Il avait été son chevalier servant, son Sigisbée, survivance du moyen-âge et de la Renaissance.

Ce qui fait leur histoire belle c’est de ne pas avoir été vécue. Ils furent deux enfants de malheur qui s’évadent de la haine du peuple dans le sourire et dans la confidence douce. Il la consolait d’un destin tragique par le charme et la joie de la voir, de l’entendre.

Elle avait consolé par l’attrait son ami de tout ce qu’il voyait et qu’il verrait souffrir d’intolérable par elle et par les siens.

Dans la fosse des fauves où ils étaient tombés, ils s’étaient fait leur ciel et leur enthousiasme.

C’est une des plus belles missions de l’amour. Surtout la Reine avait été clémente — et notre art d’aimer doit la retenir — en permettant à son ami de vivre puisqu’elle ne pouvait pas lui donner le bonheur. Là elle était la dame : celle qui respecte l’homme. Elle a pensé à l’autre : elle l’aimait, c’est pourquoi je la cite.

Celle qui ne respecte pas
l’homme est un chausson.