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Page:Austen - La Famille Elliot T1.djvu/219

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temps effacera bientôt chez le capitaine Bentick. Je ne puis croire son bonheur anéanti pour jamais ; il est jeune, il est homme, il se consolera, il oubliera sa Fanny, et sera heureux avec une autre ; et moi… Elle pensait cela en allant au-devant des amis de Wentworth, qui auraient été les siens si elle était devenue son heureuse compagne.

Ils se rencontrèrent, et Wentworth les présenta les uns aux autres. Le capitaine Harville était grand, très-brun, et n’en avait pas moins une physionomie douce et sensible ; il boitait un peu, et avait l’air assez malade, ce qui le faisait paraître beaucoup plus âgé que Frederich. Bentick, malgré l’expression de tristesse de sa physionomie, paraissait le plus jeune des trois, peut-être parce que sa taille était moins élevée et ses traits moins marqués. Sa figure répondait à l’idée qu’on s’était formée de lui ; c’était celle d’un malheureux héros de roman ; ses traits étaient agréables, ses grands yeux bleus souvent baissés étaient pleins de mélancolie ; sa bouche était belle, mais ses lèvres ne souriaient plus. Il salua poliment et avec grâce, mais ne se mêla point de la conversation ; il était ce qu’on doit être après un chagrin violent et profond.