Page:Bérard - Un mensonge de la science allemande, 1917.djvu/112

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seurs ; car d’Aubignac était encore l’un des grands noms de la critique littéraire. Il ne faut pas confondre, insinue Wolf, l’auteur de la Pratique et celui des Conjectures. L’âge ou quelque autre raison avaient mis entre eux une différence. La Pratique est un de ces « autres » livres, connus même en Allemagne, qui ont fait autrefois la renommée et démontré le bon sens de leur homme, hominis alioquin non obscuri neque insulsi, aliisque libris etiam in Germania noti. Mais les Conjectures, somnia et deliramenta !... On comprend alors les folies de d’Aubignac dans la Préface des Conjectures.

Wolf a lu les Conjectures dans la seule édition qui ait jamais existé, celle de 1715, celle qu’il indique lui-même... Or, elle n’a pas de Préface, et l’Avis au Lecteur, qui n’est pas de d’Aubignac, ne contient rien qui, de près ou de loin, ressemble à la citation de Wolf.

C’est dans la Préface, dit Wolf, in Proœmio : en l’absence de Préface, cherchons dans les premières pages de ce texte continu. On y trouve les choses les plus sensées et les plus neuves du monde et même quelques revendications assez audacieuses, où s’exprime librement l’esprit de recherche cartésien : « Il ne faut juger de rien par autorité, mais seulement par des maximes indiscutables ; il ne faut rien donner aux années, mais tout à la raison ; elle est de tout temps et l’on ne prescrit point contre elle... (p. 9). J’ai des scrupules qui m’empêchent de suivre le sentiment d’Aristote dans le sujet que nous traitons. Les opinions de ce philosophe ne doivent point être reçues comme des vérités infaillibles qui nous ôtent la liberté de la dire ; il était homme, capable d’errer... Nous ne sommes obligés de le croire par aucun serment solennel que nous ayons fait en ses maximes ni par aucune servitude qu’il ait eu droit de nous imposer ; nous sommes libres et, quand nous n’aurions point d’autre prétexte de lui résister que notre