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Page:Bacon - Œuvres, tome 15.djvu/210

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DES ANCIENS.

mes étoient encore plongés dans la plus profonde ignorance, ils cédoient aux premières séductions et les voluptés, qui alors avoient des ailes, les entraînoient rapidement ; mais dans la suite la science et l’habitude de réfléchir qui les mit en état de réprimer du moins les premiers mouvemens de l’ame, et de prévoir les conséquences de ces plaisirs auxquels ils étoient tentés de se livrer, ôta aux voluptés leurs ailes ; heureux effet des sciences, qui donna aux muses plus de relief et de dignité ; car, lorsqu’on se fut assuré, par l’exemple de quelques ames fortes, que la philosophie pouvoit inspirer le mépris des voluptés, elle parut quelque chose de sublime et d’élevé, c’est-à-dire qu’elle parut capable d’élever l’ame au-dessus du limon terrestre auquel elle sembloit être restée attachée jusqu’à cette époque, et de donner, pour ainsi dire, des ailes à la pensée humaine, dont le siège est la tête. Cette muse qui, suivant la fable, étant mère des sirènes, fut la seule qui n’eut point d’ai-