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Page:Baillon - Histoire d'une Marie, 2è édition, 1921.djvu/54

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Marie, mangez. Et regardez, moi aussi j’en mange, encore un, encore un, et c’est meilleur, parce que nous les mangeons ensemble et en même temps. Vous comprenez. Marie ?

— Quoi donc, Monsieur ?

— Le coffret, les fondants…

— Non, je ne comprends pas, Monsieur.

— Hector n’avait pas la clef, Hector ne connaissait pas le secret, Hector regardait l’extérieur du couvercle.

— Et le regardait pour lui seul. Je comprends, Monsieur. Mangeons à deux.

Il y eut, dans la vie de Marie, un gigot.

— Vous voyez, Marie, comme je découpe ce rôti ?

— Oui, Monsieur, c’est du gigot.

— Non, Marie, un symbole.

— Un ?…

— Rien. Marie. D’un côté, l’os ; de l’autre, voici la viande.

— Je vais vous débarrasser de l’os, Monsieur.

— Pas encore. Marie. La viande, on l’assaisonne au beurre, au poivre, à l’ail ; on la mange ; c’est exquis.

— Oh ! oui, Monsieur.

— L’os, vous y avez mis des papillottes, pour qu’il soit plus beau : au fond, c’est un os. Gare aux dents ! Vous saisissez, Marie ? Non ? L’os, je le regarde, et je l’appelle M. Hector ou M. l’Amour. La viande, petite, c’est moi : on s’amuse.

Elle comprenait : il y a le plaisir, il y a l’amour ; on est jeune, on n’a pas réfléchi, on les croit emmanchés l’un dans l’autre, mieux que l’os dans la viande. Et pas du tout. Voici l’os…