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Page:Baillon - Histoire d'une Marie, 2è édition, 1921.djvu/76

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Pourtant s’isoler avec un étranger qui vous veut en chemise, nue peut-être, puis avec un autre, quatre ou cinq dans la soirée. Si, du moins, on prenait le temps de se connaître ou de s’étourdir, comme le premier soir avec Monsieur ; mais si vite, cela n’est pas convenable.

Bah ! Les convenances sont des hypocrites qui, pour un peu d’argent, montrent comme les autres leur derrière de fausse maigre. Qui disait cela ? Vladimir, d’abord. Ses amies. Et aussi les amies que l’on porte en soi, qui s’appellent l’Expérience. Et encore, Palmyre, la Flamande, qui dans son langage vous rapporte un peu de pensées de là-bas.

— Pourtant, disait-elle à Palmyre, quand tu vois un agent, tu as peur : c’est donc défendu ?

— L’agent, Jésus-God ! Eh bien quoi ? S’il vous pince, on paie l’amende : c’est pour la pipe de la reine. Après on recommence.

— La pipe de la Reine ?

Voilà « Pipe de la Reine ». On ne sait pas au juste, on ne sait pas du tout. Peut-être que ça brûle, peut-être que ça fume, bouffarde, cheminée ou principe, mais : « Pipe de la Reine ! » et ce qu’on croyait défendu devient permis.

Alors on réfléchit à gauche, on réfléchit à droite. « Oui » à gauche, « non » à droite, cela se prononce « peut-être ».

Certes, au pays de sa mère, une fois pour toutes elle eût dit « non ». Mais si loin, dans une île. On a des idées que l’on consigne derrière soi sur l’autre rive. On en prend de nouvelles, un peu gênantes d’abord, néanmoins confortables. On est au pays des fenêtres en guillotine, des bouchers à tablier noir. On mange, en somme, de